Montréal, 15 mai 2012.
Le Projet Accompagnement et Solidarité Colombie (PASC) n'est pas dupe du Rapport d'impacts sur les droits humains du traité de libre-échange Canada-Colombie présenté aujourd'hui par le gouvernement canadien.
L'an dernier, afin de faire accepter l'Accord de libre-échange Canada-Colombie (ALECC) au parlement canadien, le gouvernement conservateur s'était engagé à produire annuellement un rapport sur les impacts de ce traité sur les droits humains en Colombie, avec l'accord des députés libéraux. Le premier de ces rapports a été déposé aujourd'hui. Sans surprise, le gouvernement a élaboré un « non-rapport », sous prétexte de données insuffisantes depuis l'entrée en vigueur de l'ALECC.
Inquiets des impacts d'un tel accord de libre-échange, le PASC s'est toujours positionné en défaveur de son adoption, rendue effectif en août 2011. L'initiative gouvernementale a également fait fi des recommandations du Comité permanent sur le commerce international du parlement, qui préconisait en juin 2008 qu'une étude d'impacts indépendate, impartiale et complète soit menée avant d'aller de l'avant avec l'ALECC. Le processus actuel entourant l'évaluation des impacts de droits humains n'est pas indépendant, et ne prévoie pas de consultation. Et même s'il nous présentait tous les aspects les plus négatifs de l'ALECC, presqu'aucun mécanisme n'existe pour améliorer la situation.
Via l'ALECC, le Canada appuie un gouvernement dénoncé au niveau international pour ses violations de droits humains, particulièrement envers les populations autochtones et les militants sociaux. 60% des syndicalistes assassinés dans le monde le sont en Colombie : c'est 49 sur 90 en 2010, selon une étude de la Confédération syndicale internationale, et 51 ont été tués en 2011. Les régions riches en minéraux et en combustibles ont les plus haut taux de violence au pays, marquée par des assassinats ciblés de leaders communautaires et de syndicalistes, par des massacres et par des déplacements forcés. La majeure partie des personnes victimes de déplacement forcé en Colombie, qui sont près de 5 millions de personnes, est originaire de ces régions. (Sources : CODHES et Peace Brigades International Colombia: Mining in Colombia: At what Cost?, 2011)
Il est conséquemment encore plus troublant et révoltant de savoir que notre gouvernement supporte des compagnies canadiennes, notamment du secteur minier, qui investissent en Colombie dans des projets ayant des impacts dévastateurs autant sur le plan environnemental que social. Les compagnies enregistrées au Canada représentent 52% de l'investissement minier en Colombie. Nous dénonçons la manière dont les compagnies canadiennes profitent de la guerre et de l'impunité en Colombie, situation qui ne peut que s'aggraver avec l'ALECC et les récentes annonces de l'Agence canadienne de développement international quand aux partenariats avec les entreprises minières (« La ministre Oda annonce des initiatives visant à accroître les retombées positives de la gestion des ressources naturelles pour la population de l'Afrique et de l'Amérique du Sud », 29 septembre 2011, http://www.acdi-cida.gc.ca/acdi-cida/ACDI-CIDA.nsf/fra/CAR-929105317-KGD), largement dénoncées par le milieu de la coopération internationale « Virage controversé dans l'aide internationale », Agnès Gruda, La Presse, 24 mars 2012).
Pour ne citer que deux exemples de compagnies canadiennes dénoncées dans la dernière année pour les profits qu'elles tirent du conflit colombien, mentionnons les cas de Pacific Rubiales et de Medoro ressources.
La pétrolière canadienne Pacific Rubiales Energy exploite des champs pétrolifères où travaillent, en sous-traitance, environ 14 000 ouvriers dans la région de Puerto Gaítan et Campo Rubiales (département du Meta). Lorsque ses travailleurs précaires (embauchés via des contrats mensuels, soumis à des journées de travail allant jusqu’à 18h, travaillant jusqu’à 40 jours sans jour de repos et recevant uniquement le salaire minimum, qui équivaut au quart du taux salarial des ouvriers du pétrole en Colombie) se sont déclarés en « Assemblée permanente » puis en grève en 2011 pour mobiliser les communautés locales autour de leurs demandes sociales et syndical, la réponse a été musclée : intervention militaire, renvoi de plus de 500 employés soupçonnés d’activités syndicales, les dirigeants syndicaux ont reçu des menaces de mort de la part d’éléments paramilitaires. Pour en savoir plus : http://www.pasc.ca/fr/action/ConvoiHumanitaire-PacificRubiales
La minière Medoro entre dans la municipalité de Marmato, un village du département de Caldas, en 2010 et apporte avec elle des rumeurs d’une exploitation à ciel ouvert qui nécessiterait la destruction de l’ensemble du village historique. Plusieurs stratagèmes ont alors été usés pour faire déplacer la population : une alerte devant l'imminent risque d'effondrement de la montagne, démentie par les études de stabilité du sol, puis la Medoro engage deux « ONG vitrines » pour réaliser la conciliation et gagner les faveurs de la population, mais la population s’est organisée pour éviter son déplacement forcé. En juin 2010, les résident-e-s de Marmato se sont déclarés en « grève générale et pacifique contre la compagnie Medoro ». En mai 2011, ce sont 4000 habitant-e-s qui bloquaient les routes. Le mouvement a été réprimé par les effectifs policiers qui ont reçu l’appui des gardes privés de Medoro Resources. Pour en savoir plus : http://www.pasc.ca/fr/article/la-canadienne-medoro-ressources-rase-un-village-pour-ouvrir-une-mine-dor-%C3%A0%C2%A0-ciel-ouvert ET http://www.pasc.ca/fr/action/communiqu%C3%A9-conjoint-suite-%C3%A0-lassassinat-du-p%C3%A8re-reinel-restrepo-%C3%A0-marmato-opposant-aux
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Contact:
514-966-8421
Projet Accompagnement et Solidarité Colombie (PASC)
Voir le communiqué du Groupe d'orientation politique pour les Amériques du Conseil canadien pour la coopération internationale : « Human rights and the Canada-Colombia FTA », May 14, 2012 au http://www.ccic.ca/media/news_detail_e.php?id=204