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01/10/2006

Derrière l'expression "profiteurs" se pose la question de l'identité de ceux et celles pour qui la guerre est un trafic ainsi que leurs motivations et objectifs. Les profiteurs de guerre ne sont pas seulement ceux qui profitent du commerce des armes. Nous les retrouvons également parmi celles et ceux qui poussent à la guerre et qui élaborent une stratégie réfléchie pour en tirer des bénéfices. Parmi les profiteurs de guerre, nous pouvons inclure : Les grosses sociétés privées Nous faisons ici référence aux sociétés multinationales et transnationales ayant besoin de contrôler nos ressources naturelles et nos territoires pour soutenir leurs projets d'hégémonie et pour empêcher l'amélioration de relations politico-économiques solidaires, lesquelles permettraient un développement réel des pays latino-américains.

Elles sont aussi des profiteurs de guerre parce que leurs stratégies d'entreprise se basent sur l'aggravation du conflit armé et le renforcement des acteurs militaires et paramilitaires dans le but d'imposer des mégaprojets qui leur permettent de s'approprier notre pays.

Ci-dessous quelques entreprises tirant profit de notre pays : Sous couvert de mondialisation, ces multinationales achètent les compagnies publiques locales, font main basse sur le pétrole, l'eau, l'oxygène, le nickel, la leucite, le plutonium et le mercure (ces quatre derniers sont utilisés dans l'industrie de l'armement).

Ces mégaprojets ont, entre autres, pour conséquence l'expropriation des terres appartenant à la population locale, l'exploitation de la main-d'oeuvre locale, et l'aggravation du conflit car ces projets renforcent les causes structurelles de la pauvreté et de l'inégalité .

Les institutions financières contribuent à la guerre de deux manières : par les prêts concédés pour des investisseurs dans la guerre d'une part, et via l'accumulation dévastatrices de richesse qui accroissent encore les causes structurelles de la pauvreté en Colombie d'autre part. 21,9 millions de gens soit 49,2% de la population colombienne vivent sous le seuil de la pauvreté, 6,6 % de la population (14,7 % pour les indigènes) vivent dans la pauvreté extrême. On peut citer les banques Santander et BBVA qui sont aujourd'hui leaders sur le marché du prêt immobilier et parmi les plus importantes institutions financières en Colombie. Ces compagnies sont actionnaires au niveau international de l'industrie européenne de l'armement et prêtent à des investisseurs de cette industrie.

Les États :

Les puissances mondiales : via des interventions politiques, économiques et militaires dans d'autres pays, les grandes puissances mondiales cherchent à contrôler les richesses et les territoires de régions moins puissantes. C'est le cas des États- Unis qui investissent plus de $350 millions de dollars annuels dans la guerre en Colombie. De plus, des organisations multilatérales tels la Banque mondiale, le FMI, la Banque de développement interaméricaine et l'OMC prêtent de l'argent aux pays en voie de développement, augmentant la dette interne et externe, et leur imposant comme condition d'adapter leurs économies au modèle économique néolibéral.

Les pays du tiers-monde, à travers des politiques de défense et de sécurité nationale, renforcent le conflit. L'ordre public est maintenu aux dépens des droits fondamentaux. S'est ajoutée au début des années 90, l'ouverture du marché via des politiques néolibérales comme instituées par le consensus de Washington qui promeut l'affaiblissement de l'État providence, lequel doit céder face à des sociétés privées, des multinationales et plus généralement face au grand corporatisme de la privatisation du social et de la santé.

Il y a aussi la création et la maintenance de structures paramilitaires que ce soit une politique étatique -le cas colombien- ou en concertation avec les intérêts privés mondiaux. La spéculation sur la guerre en Colombie revêt entre autres les formes suivantes :

Le projet présidentiel a présidence qui considère les droits comme étant des services.

La mafia qui infiltre les structures militaires à travers le trafic de drogue et les liens avec les groupes paramilitaires. Résultat de la prolifération des acteurs armés : les possibilités d'être embauchéE en Colombie dans un emploi sans relation ni avec la militarisation ni avec la guerre sont très réduites.

Les gouvernements colombiens et américains, via le plan Colombia et le plan patriote qui luttent contre le narco-trafic mais cherchent aussi à éliminer la guérilla ? Cependant, cette guerre à la drogue s'attaque directement à la partie la plus faible de la chaîne : les cultivateurs de la coca, les producteurs de pâte de coca et la population civile qui subit l'utilisation d'herbicides toxiques mais pas aux vrais trafiquants : les propriétaires terriens et les politiques qui gèrent le marché et le transfert de la drogue.

La politique de défense qui prime sur les droits fondamentaux en mettant l'accent sur l'augmentation des dépenses militaires au détriment de la santé, de l'éducation et des droits de l'homme.

Le ministère de la défense ne se contente pas de peser lourdement sur le budget national, il possède son propre groupe de 21 entreprises dont se détachent Indumil (fabricant d'armes), l'Hôtel Tequendama, et l'université militaire. Ce groupe fonctionne comme un fond rotatoire dont les bénéfices sont investis dans la sécurité démocratique... Qu'adviendra-t-il de l'excédent ?

Le ministère de l'intérieur avec le processus de retour à la vie civile de 43000 soldats actuellement démobilisés. La stratégie de 'paix' prétend capter les énergies alors que les deux premières années du nouveau mandat d'Uribe renforce les forces armées et le discours de la guerre.

Les sociétés de sécurité privées qui embauchent dans leurs officines des officiers démobilisés des forces paramilitaires les remettant dans les rails de la confrontation armée.

Et le gouvernement colombien montre une complaisance totale à l'égard des stratégies dessinées aux États-Unis pour garantir les objectifs de ces projets.

Le plan Colombie : Cette stratégie militaire est réaffirmée dans le document d'octobre "la ley de la estampilla", et renforcée par l'Initiative Régionale Andine (IRA) qui met en concurrence les états à travers leurs structures militaires maintenant ainsi le cercle vicieux de l'économie guerrière.

Le plan Patriot et l'IRA chechent à freiner le développement du CAN-3 (Equateur, Colombie et Vénézuéla), et à confirmer l'Amazonie comme mine de brevets biologiques.

Les plans Houston, Puebla-Panamá, Bogotá qui promeuvent la culture et l'exploitation de plantations d'eucalyptus et l'intégration de la Colombie à l'économie mondiale via le canal inter-océanique de Chocó, la finition de l'autoroute Pan-Américaine dans la région de Darién, et le gazoduc traversant Panamá, la Colombie et le Vénézuéla.

Les media

Les media jouent un rôle de commerçants de l'information changeant les faits relatifs à la guerre en Colombie en produit à négocier au profit des agences de communication. Outre sa partialité dans l'information soutenant les forces armées pour légitimer le statu quo, les media sont très inclinés à ancrer l'idée que toute opposition est une forme de terrorisme ou de rébellion. Les media vendent le projet de 'sécurité démocratique' du gouvernement, le processus de la démobilisation paramilitaire, l'essor des sociétés de sécurité privées et les investissements étrangers s'appropriation les ressources naturelles, sous un jour positif. Concrètement, les media qui spéculent sur la guerre en Colombie sont :

RCN dont l'information partiale favorise les partis politiques et les individuEs qui soutiennent la guerre. Lors des récentes élections présidentielles, RCN n'a pas impulsé de débats entre les candidats et partis, préférant un prosélytisme politique en faveur du candidat des patrons. Ce n'est pas une coïncidence si ce groupe médiatique est contrôlé par le groupe Ardila Lule dont les intérêts sont totalement compatibles avec le projet du camp Uribe.

De manière générale, une série de programmes apportent leur soutien aux forces armées dont Radio Policia Nacional, l'émission de l'armée, des programmes télévisés sur la chaîne institutionnelle, l'émission 'Impacto' sur UNO, et la série documentaire 'Hommes d'Honneurs' qui cherche à créer un imaginaire positif des gens envers l'armée, pour que la société croie la militarisation comme étant le moyen de résoudre les conflits internes. Ces stratégies de communication utilisent des fonds publics tout en ayant une liberté de gestion pour la constitution d'un capital leur permettant d'étendre leurs programmes de militarisation sociale.

Enfin, la publicité de la sécurité et des forces armées : panneaux publicitaires, bannières, affiches... pour inspirer un sentiment de 'sécurité' à la population. Les grilles des rues périphériques aux casernes ou aux centres de commandements, les véhicules policiers et militaires occupent l'espace public en ville, générant ainsi une société du contrôle militaire sur le quotidien des centres urbains.

On en finit par conclure qu'être profiteur de guerre est plus facile et plus lucratif que d'être un acteur du conflit armé. Il apparaît aussi que les personnes faisant leur beurre avec la guerre sont souvent plus machiavéliques que les soldats euxmêmes. Elles détiennent les ficelles du pouvoir et de la mort, mais ne se salissent pas les mains préférant déléguer à d'autres l'exécution des tueries.

 

"Intervention géopolitique et exploitation en Colombie"

Entreprise Megaprojet
Coca-cola Barrage hydroélectrique dans le massif colombien
Nestlé Élevage et production laitière dans la Cauca, la Caquetá et les vallées de Putumayo
Amoco, Texaco, Exxon Gazoduc traversant la Colombie, le Vénézuela et Panama
Drummond Exploitation de méthane et de charbon à La Loma, Magdalena
Monsanto Ressources en eau de la Vega, dans la Cauca (près de la triple-frontière d'Amazonie)

 

Publié dans la revue Le fusil brisé, Septembre 2006, No. 71

Auteur.trice
Action Collective pour l'Objection Fiscale (FOKA)