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06/06/2017

Résumé de la section sur la Colombie du rapport de l'OCMAL Conflictos mineros en América latina : extractivismo, saqueo y agresión, Estado de situación en 2016, qui est disponible en espagnol ici.

L’année 2016 a marqué la signature d’un accord entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et le gouvernement colombien et la fin de plus de soixante ans de conflit. La même année, l’armée de libération nationale (ELN) a également entamé des pourparlers. Sans vouloir mettre en doute l’importance de ces évènements, la guerre n’est pas finie. Les populations rurales, qui ont été les plus affectées par le conflit, subissent maintenant les répercussions négatives des conditions instaurées par l’accord. En fait, il semble que tous les acteurs de la société ne s’entendent pas sur le sens qui doit être donné à la paix. Alors que les mouvements sociaux entendent par paix le respect des biens communs comme l’eau et la sécurité alimentaire, le gouvernement lui confère le sens d’une certaine prospérité économique, orientée vers l’exploitation minière. Malheureusement, ces activités ont des conséquences désastreuses sur les écosystèmes, entraînent la mort et le déplacement de populations de diverses localités, la perte de ressources hydriques et même la privatisation du bien commun.

Les débats judiciaires de 2016 ont gravité autour la protection de l’environnement et le droit des populations locales concernées d’être consultées en ce qui concerne l’exploitation minière. Plus précisément, trois décisions de la cour constitutionnelle ont fait jurisprudence à cet égard. Elles ont été le résultat de revendications d’organisations non gouvernementales, de mouvements sociaux et de congressistes. Ces décisions exigent, entre autres, que le gouvernement consulte les populations locales pour l’octroi de concessions minières. Aussi, alors que le gouvernement avait décidé ne pas offrir de compensations aux victimes du conflit qui résidaient dans des localités où devaient voir le jour des projets de développement économique, la Cour a infirmé cette décision.   Cette dernière a également souligné l’importance de la délimitation des zones d’exploitation afin de protéger les écosystèmes. Il a été déterminé que les autorités des localités pouvaient contrôler l’utilisation de leurs ressources, protéger l’environnement et même interdire l’exploitation minière. La cour exige également que le gouvernement évalue de manière scientifique les répercussions des activités minières sur l’écosystème colombien. Ces décisions constituent une avancée juridique importante, autant pour la protection des écosystèmes que pour la reconnaissance de la compétence des autorités locales. Suite à ces décisions, les mouvements écologistes, de concert avec les autorités municipales, ont organisé dans de nombreuses localités, des consultations publiques sur l’utilisation des sols et la protection de l’eau.

Ces décisions ont provoqué la réaction des entreprises minières, car ces avancés n’ont pas été sans conséquence sur le nombre de concessions minières. Les multinationales ont même entamé des procédures judiciaires contre l’État colombien. Parallèlement, le gouvernement a récemment rendu public un document ayant pour objet la mise en marche du plan de développement 2014-2018, qui insiste sur l’importance du secteur énergétique minier. Le gouvernement cherche ainsi à proposer des politiques minières au « visage vert » pour parer aux obstacles que constituent la mobilisation sociale et la consultation publique des communautés affectées. Il prétend ainsi corriger certaines distorsions dans la manière dont les activités minières sont perçues, qualifiant d’« insécurité juridique » les avancées récentes.

La chute du prix du charbon dans les dernières années a affecté l’économie colombienne. Le marché colombien du charbon a aussi subi des transformations en raison de la diversification énergétique de l’Europe, son principal client, et de la résistance des communautés locale à l’exploitation. Le gouvernement planifie toutefois une expansion de l’exploitation du charbon dans les régions de La Guajira et du Cesar, qui doit affecter les sources hydriques de ces régions. Une expansion de l’exploitation est également prévue dans le Santander, Antioquia, Norte de Santander, Boyaca et le Cundinamarca.

L’or, pour sa part, est exploitée dans le Santander et en Antioquia par des entreprises locales, canadiennes et arabes. Ces activités minières affectent certains écosystèmes vitaux et même des terres de haute rentabilité agricole. Il semble que le gouvernement désire quadrupler la quantité d’or extraite chaque année et prévoit encore l’expansion de l’exploitation de l’or dans des zones protégées comme cela a été le cas dans le Tolima. Les richesses en or que renferment les sous-sols du pays sont estimées à 146 millions d’onces troy et seraient réparties sur près d’un dixième de la superficie du pays. Son extraction a le vent dans les voiles et de nouveaux projets sont prévus. Cependant, l’industrie a subi dans les dernières années les soubresauts du prix de l’or. Malgré cela, le métal précieux a servi à alimenter les conflits et a fait l’objet d’une extraction informelle (que le gouvernement compterait toutefois légaliser). En somme, l’État colombien cherche à se donner l’apparence du chef de file de l’exploitation de l’or en Amérique latine, mais fait preuve d’un laxisme démesuré dans sa réglementation, et ce, au détriment des populations locales et de l’environnement.

Le marché des matériaux de construction, dont l’argile et le sable, est en pleine croissance en raison de projets de construction d’infrastructures lancés par le gouvernement le long de ses voies 4 G, du développement de certaines agglomérations importantes et pour approvisionner les industries minières et pétrolifères. Comme pour l’or et le charbon, le gouvernement colombien élargit les zones d’exploitation, ce qui se trouve à avoir des répercussions sur les sources d’eau, des zones qui revêtent une certaine importance archéologique, des zones au potentiel agricole et des zones protégées. Tout cela se fait au nom de la croissance économique du pays.

 

Auteur.trice
OCMAL