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31/07/2013

Le président de la Colombie, Juan Manuel Santos, a reconnu jeudi pour la première fois la responsabilité de l'Etat dans de "graves violations des droits de l'homme" commises dans le cadre du conflit armé qui secoue le pays depuis un demi-siècle.

La Colombie a reconnu pour la première fois que l'Etat avait eu une part de responsabilité dans les violences commises pendant le plus vieux conflit d'Amérique latine, un pas important mais pas sans risque dans le processus de paix engagé avec la guérilla marxiste des Farc.

Le président Juan Manuel Santos a admis solennellement jeudi que l'Etat avait été "responsable, parfois par omission, parfois de manière directe, de graves violations des droits de l'homme et d'infractions au droit humanitaire international" au cours d'un demi-siècle de conflit.

Le chef de l'Etat a prononcé ces mots historiques devant la Cour constitutionnelle dans le but de défendre une réforme judiciaire cruciale pour le succès des négociations de paix ouvertes l'an dernier avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc).

Votée par le Congrès l'an dernier, cette réforme baptisée "Cadre juridique pour la paix" et qui doit encore recevoir l'aval de la Cour, prévoit notamment la possibilité de la suspension de peines de prison pour les guérilleros repentis, des mesures dites de "justice transitionnelle". 

"La déclaration de Santos est un message très important pour la société. Il est clair que les Farc attendaient ce geste", a expliqué à l'AFP le politologue colombien Fernando Giraldo, tout en signalant qu'elle va "engager encore plus l'Etat pour les réparations aux victimes" et aussi pouvoir servir d'"instrument juridique à charge contre les militaires devant les tribunaux".

La loi du "Cadre juridique" suscite toutefois la préoccupation de plusieurs organismes humanitaires comme Human Rights Watch, qui considère qu'elle risque de se traduire par l'impunité pour de nombreux rebelles repentis, même si les principaux dirigeants des Farc ont déjà été condamnés par contumace.

Cette réforme "cherche à bâtir une stratégie réaliste et transparente qui permette de répondre de la meilleure des manière aux droits de toutes les victimes", a plaidé M. Santos, réfutant le terme d'"impunité".

Délocalisés à Cuba, les pourparlers avec les Farc, qui comptent encore 8.000 combattants selon les autorités, abordent plusieurs points sensibles comme la nécessité d'une réforme rurale, le trafic de drogue, l'abandon des armes, mais aussi la participation de la guérilla à la vie politique et les réparations pour les victimes.

 
Le conflit interne, qui a mis en scène des guérillas communistes comme les Farc et l'ELN (Armée de libération nationale), des milices paramilitaires comme les AUC (Auto-défenses unies de Colombie) aujourd'hui démobilisées ainsi que des bandes criminelles, a fait plusieurs centaines de milliers de morts et provoqué le déplacement de près de quatre millions de personnes.

Des membres de l'armée ont aussi été impliqués, notamment via leurs liens avec les milices, dans la mort de civils, présentés parfois comme des guérilleros tués au combat.

Quelque 1.295 cas de civils ayant ainsi péri sont actuellement en cours d'examen par le Parquet, selon les estimations d'organisations de défense des droits de l'homme.

Le thème de la justice militaire a toujours été très sensible en Colombie, où des membres de l'armée ont été mis en cause pour des crimes, en particulier sous le mandat de l'ancien président Alvaro Uribe (2002-2010), l'un des plus farouches opposants aux négociations de paix.

"Santos défendra l'impunité, mais il ne le dira pas", a aussitôt réagi M. Uribe sur son compte Twitter.

 A un an de l'élection présidentielle, la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat "peut redonner de la force aux secteurs radicaux qui ne veulent pas entendre parler d'excuses", a averti M. Giraldo.

Le président Santos a également averti que les combattants repentis des guérillas ou des AUC devaient eux aussi "assumer leur propre responsabilité", jugeant que c'était "fondamental" afin de "se diriger vraiment vers la fin du conflit".

Le directeur de la Commission colombienne des juristes, Gustavo Gallon, a pour sa part défendu l'idée d'une "justice transitionnelle", si elle est appliquée "avec compréhension". "La paix ne peut être fondée sur le pardon mutuel entre combattants, mais sur les victimes, qui en jugeront en dernière instance", a-t-il dit.

AFP

Source : leberry.fr, le 25 juillet 2013


Photo: Le président de la Colombie, Juan Manuel Santos. Photo John Vizcaino, Archives REUTERS

http://www.fr.lapluma.net/index.php?option=com_content&view=article&id=…

 

Auteur.trice
leberry.fr, La Pluma