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07/11/2013

Monsieur:
Paul Bulcke
Directeur général (CEO) de Nestlé S.A

C’est avec beaucoup de préoccupation que nous avons appris que des travailleurs de Nestlé-Colombie ont commencé aujourd’hui une grève de la faim. Une grève de la fin n’est pas une protestation banale; cette mesure, qui nuit très probablement à la santé des grévistes, s’applique quand toutes les autres mesures de protestation ont été utilisées sans que des résultats soient obtenus. C’est ce qui s’est passé à Bugalagrande: ça fait longtemps que le syndicat Sinaltrainal exige que Nestlé respecte la convention signée en juin 2012. Mais ça n’a pas été possible. Depuis plusieurs mois, la gérance de Nestlé refuse de dialoguer avec le Syndicat National des Travailleurs de l’Industrie de l’Alimentation – Sinaltrainal – et, comme si ceci n’était pas suffisant, elle a augmenté la pression contre celui-ci. Les travailleurs sont fortement incités à s’affilier à Sintraimagra, le syndicat concurrent qui est proche de la gérance de l’entreprise.


Toutes ces mesures ont pour objectif d’affaiblir Sinaltrainal et elles violent les droits syndicaux. A cela, il faut ajouter que Nestlé délégitime et diffame Sinaltrainal. Il faut se rappeler que le 31 octobre passé, dans un communiqué signé par le président de Nestlé-Colombie Manuel Andrés Kornprobst, Sinaltrainal était accusé, injustement et de manière infondée, d’appeler à commettre des actes de violence et de sabotage.


Monsieur Bulcke: ce type d’accusations, dans le contexte colombien, sont très dangereuses et transforment – comme cela est déjà arrivé – les syndicalistes en cibles pour les paramilitaires. Dans les fabriques de Nestlé en Colombie, plusieurs travailleurs, impliqués dans le conflit de travail, ont été menacés de mort. Cependant, l’entreprise ne s’est pas prononcée face à ces situations et n’a rien fait pour garantir leur sécurité. Nous voulons répéter que ceci est absolument nécessaire : dans la passé, 14 travailleurs de Nestlé ont été assassinés, et d’autres ont été victimes d’attentats ou ont dû quitter la région à cause des menaces. Dans ce contexte, nous vous rappelons qu’en Suisse, une demande contre Nestlé SA et contre les directeurs de cette entreprise est en cours, pour avoir omis de prendre des mesures de protection dans le cas de l’ex-travailleur et syndicaliste de Sinaltrainal Luciano Romero. Luciano Romero, comme vous le savez, a été séquestré, torturé et assassiné en 2005 par des paramilitaires. Nestlé avait connaissance des menaces à son encontre, mais n’a rien fait pour le protéger.


Sinaltrainal a critiqué plusieurs fois le fait que les importations croissantes de lait en poudre et d’autres matières premières mettent en danger des postes de travail en Colombie, de même que l’existence de petits et moyens producteurs. Le syndicat a mis en évidence devant Nestlé – et quand cela ne fut pas suffisant – devant l’opinion publique plusieurs cas dans lesquels il a pu être constaté que la qualité des produits de Nestlé n’était pas adéquate. Récemment, Sinaltrainal a attiré l’attention sur des problèmes de pasteurisation et de stérilisation insuffisante de la production, de boîtes de conserve oxydées, de matières premières importées de mauvaise qualité et de présence de particules métalliques. Le fait que le président de Nestlé-Colombie accuse le syndicat de porter préjudice à la qualité des produits a tout l’air d’être une manœuvre pour détourner l’attention des cas mentionnés ci-dessous et constitue une accusation très dangereuse qui met en danger la vie de ceux qui sont affiliés au syndicat.
Face à tous ces faits, nous sommes très préoccupés et nous vous appelons – en tant que CEO de Nestlé – à assumer votre responsabilité et à assurer une solution à ce conflit. En particulier, nous exigeons :

  • Que Nestlé-Colombie entre immédiatement en dialogue avec Sinaltrainal;
  • Que Nestlé-Colombie respecte entièrement la convention signée avec Sinaltrainal ;
  • Que Nestlé-Colombie cesse de délégitimer et diffamer Sinaltrainal, car cela met en danger les syndicaliste ;
  • Que Nestlé-Colombie abandonne les mesures antisyndicales contre Sinaltrainal ;
  • Que Nestlé-Colombie garantisse entièrement la liberté syndicale ;
  • Que Nestlé-Colombie fasse le nécessaire pour protéger la vie et l’intégrité des syndicalistes menacés et de leur famille.


Nous voulons aussi vous demander de vous distancer publiquement et de condamner les menaces de mort contre les syndicalistes dans les fabriques Nestlé. Finalement, nous vous demandons de nous informer sur les mesures que vous aurez prises pour résoudre ces problèmes.


Recevez nos salutations distinguées,


MultiWatch


5 novembre 2013

Auteur.trice
MultiWatch