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29/12/2006
En Colombie, la politique publique flexibilise de plus en plus la possession collective de la terre, en plus de faire la promotion de la culture de la palme, et ce malgré tout ce qu’entraîne une telle monoculture extensive. Des analyses du groupe Ecologistas en Acción, du Movimiento Mundial por los Bosques, du CETRI et de la Comisión de Justicia y Paz ont démontré récemment l’évidente incohérence du discours écologiste mis de l’avant par les promoteurs des biocombustibles et l’impossibilité d’une étique authentique empresariale dans le cadre d’une production « propre ». Dans ce domaine, la rationalité et les intérêts du marché priment encore sur le bien-être de l’humanité et de la planète. Dans le cas de la Colombie, des milliards d’hectares de plantation de palme se trouvent sur des territoires ayant été appropriés de façon illégale. On considère que les droits humains ont été systématiquement violés dans ces zones et que sur le plan écologique, se sont commis des crimes irréparables par la destruction d’écosystèmes complexes. Il est fréquent de voir des promoteurs utiliser stratégiquement le discours vert afin de donner l’image qu’ils aident à préserver l’environnement. Dans bien des cas, la réalité est autre, si l’on prend pour exemple la culture de la palme, un discours très écolo fait la promotion d’une huile moins polluante, plus « propre ». La transformation de la palme en huile et la promotion de cette huile comme bio-combustible cache pourtant une autre face, celle-ci beaucoup moins connue par contre. L’issue à la crise du pétrole n’est pas à envisager à travers les bio-combustibles, il doit y avoir un changement majeur au niveau des mentalités, tant chez les entrepreneurs que chez les consommateurs du Nord et du Sud. Nous devons faire, dans notre système, des changements importants au niveau structurel. Nous avons traduit ici un article pertinent sur la question, « Biocombustibles : grave amenaza disfrazade de verde », écrit par le Movimiento Mundial por los Bosques, http://www.wrm.org.uy Bogotá D.C. 29 décembre 2006 Comision intereclesial de Justicia y Paz


Les bio-combustibles : une grave menace déguisée en vert En plus de ne pas résoudre le problème des changements climatiques, l’utilisation de bio-combustibles aggravera d’autres problèmes environnementaux. Des centaines de millions d’hectares de terres fertiles sont concentrées sous le pouvoir de grandes transnationales et serviront à produire du combustible au lieu de produire des aliments, et ce dans un monde où la faim et la dénutrition est déjà un problème criant. La substitution des combustibles fossiles par les bio-combustibles (faits à base de biomasse végétale) peut paraître à premier abord comme un pas dans la bonne direction pour éviter une aggravation du réchauffement climatique, mais voyons un peu l’autre facette de la problématique. Les principaux bio-combustibles envisagés sont le bio-diesel (obtenu grâce à des plantes oléagineuses) et l’éthanol (obtenu par la fermentation de la cellulose contenue dans les végétaux). Plusieurs cultures peuvent se prêter à ces fins, soit le soya, le maïs, le colza, l’arachide, le tournesol, la palme, la canne à sucre, le peuplier ou encore l’eucalyptus. Étant donné que les grands consommateurs du Nord ne prévoient pas réduire leur consommation disproportionnée de combustibles et que dans la majorité des cas la disponibilité des terres n’est pas assez grande pour atteindre une autosuffisance locale au niveau des matières premières nécessaires pour produire les bio-combustibles, les gouvernements et entreprises ont planifié promouvoir les cultures permettant la production de bio-diesel et d’éthanol majoritairement dans les pays du Sud. Il est important de mentionner que l’application d’une telle politique n’impliquera en rien des changements en matière d’exploitation pétrolière ou gazifière. Les principales candidates pour la production de bio-diesel à grande échelle sont le soya et le palme. La première a constitué la principale cause de déforestation en Amazonie brésilienne et au Paraguay avant même qu’elle soit utilisée à des fins énergétiques. Pour sa part, la palme a aussi causé énormément de dommages forestiers en Indonésie mais aussi dans d’autres pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. De l’autre côté, le développement de technologies voulant transformer le bois en éthanol (en utilisant des organismes génétiquement modifiés-OGM) est déjà commencé. De telles méthodes impliquent une expansion encore plus importante des monocultures d’arbres à croissance rapide. Le processus de déforestation engendre la libération du carbone qui y était accumulé, ajouté aux émissions émises lors de la transformation, du transport, etc. En bout de ligne, la balance nette de carbone dans les airs destiné à la production de bio-combustibles peut être jusqu’à négative, contribuant ainsi à la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, ce qui prétend justement être évité par ce changement. D’un côté social, les monocultures extensives contribuent à l’expulsion de millions de producteurs ruraux et de petits paysans qui sont forcés d’émigrer vers les ceintures de misère des grandes villes. Ainsi, la campagne cesse ainsi d’assurer la subsistance de millions de personnes et sort elle aussi perdante de cette transformation radicale. L’eau, la faune, la flore, les sols en sont profondément touchés. Si évident que cela puisse paraître, les bio-combustibles ne sont pas une solution long terme à envisager, et ce ni pour les gens ni pour l’environnement. Cependant, ils constituent une excellente opportunité économique pour les grandes entreprises nationales et transnationales qui calculent déjà les retombées du développement d’une telle source d’énergie dans beaucoup de secteurs de l’économie. C’est d’ailleurs pour eux que tant de gouvernements, d’agences bilatérales et multilatérales, d’experts internationaux sont impliqués dans la promotion de cette solution absurde : pour servir les intérêts des puissants groupes économiques, qui sont aussi ceux qui dictent les politiques globales en leur propre faveur. Il faut clarifier ici que les bio-combustibles en soi ne sont pas un problème. Au contraire, avec une approche socialement et environnementalement adéquate ils peuvent servir à satisfaire les nécessités énergétiques. Le problème central est au niveau du modèle à travers lequel on tente de l’appliquer ; monoculture à grande échelle, utilisation massive de produits chimiques, OGM, mécanisation, exportation, surconsommation d’énergie, néo-colonialisme, etc. Bio-combustibles à grande échelle : bons pour le pouvoir; mauvais pour les gens et le climat ! La consommation et la production de bio-diesel ont déjà eu des impacts négatifs sur la sécurité alimentaire, les forêts et autres écosystèmes. Tout indique que de tels impacts ont tendance à s’additionner rapidement. Les monocultures de matière première nécessaire à la production de bio-combustibles constituent déjà une cause importante de déplacement des populations rurales et de déforestation. De plus, la supposée « neutralité du carbone » du bio-diesel à été réfuté puisqu’elle ne tient pas compte de la façon dont s’établissent les plantations de palme. Des calculs réalistes démontrent que la production de bio-combustibles à partir de cultures végétales demande plus d’énergie proportionnellement à sa contribution à la réduction d’émission de gaz à effet de serre. Pour sa part, l’Union européenne promeut les bio-combustibles comme fond d’énergie pour le transport et s’est fixé comme objectif d’ici 2010 d’atteindre 5.7% de l’énergie totale utilisée au niveau du transport. Dans une réunion du Conseil de l’agriculture ayant eu lieu le 20 février 2006, s’est tenu le premier débat politique sur la stratégie des bio-combustibles et le plan européen d’action sur la biomasse. Pour ces pays, l’avantage est au niveau du prix de production qui est inférieur à celui du pétrole. Pour les agriculteurs européens, la production nationale de bio-combustibles pourrait engendrer de nouveaux revenus et plusieurs emplois suite à une réforme de la politique agricole commune (PAC). L’Allemagne, la France, l’Australie utilisent déjà le bio-diesel et de plus en plus les bio-combustibles tendent à se diffuser à travers toute l’Europe. Aux États-Unis, les bio-combustibles sont bien reçus en tant que façon de couper la dépendance au pétrole étranger. Ils constituent donc une combinaison du patriotisme et des intérêts économiques. À l’autre extrême, dans les pays du Sud, les impacts sont proportionnels à l’augmentation de la demande. Étant conscientEs de cette réalité, il devient donc impératif d’opérer un changement fondamental dans notre façon de consommer l’énergie au lieu de simplement substituer le pétrole par les bio-combustibles. Une coalition d’ONG des droits humains et de l’environnement ont proposé que ce changement passe par la promotion du transport publique, l’augmentation de l’utilisation des énergies renouvelables (solaire, éolienne, etc), l’application de critères stricts par rapport aux matières premières des bio-combustibles, tel l’interdiction de transformer une forêt primaire en plantation, le respect des droits humains, la promotion de la culture biologique, l’interdiction de monocultures extensives. La déclaration appelle aussi à ce que soit respectés les traités internationaux concernant les autochtones, la biodiversité, les droits des travailleurs, etc. De plus, d’autres ONG, organisations de peuples autochtones et mouvements d’agriculteurs appellent les parties de la Convention Marco des Nations unis sur le changement climatique à suspendre immédiatement toutes formes d’appuis inégaux à l’importation et l’exportation de bio-combustibles. Ces organisations déclarent qu’ « il n’y a rien de vert ni de durable dans le bio-combustible importé. Au lieu de détruire les terres et les moyens de subsistance des communautés locales et des peuples autochtones du Sud par une autre forme de colonialisme, nous appellons les pays du Nord à reconnaître leur responsabilité face à la destruction de systèmes climatiques, réduire leur consommation d’énergie, payer la dette climatique qu’ils ont occasionnée et augmenter considérablement les investissements au développement de l’énergie solaire et éolienne durable. » Extrait du Bulletin 112 du WRM Movimiento Mundial por los Bosques (Mouvement mondial pour les forêts) http://www.wrm.org.uy
Author
Justicia y Paz