Bogotá, le 7 Mars 2015
Le 7 mars 2015, dès 5h du matin, l’anti-émeute de la police nationale a violemment expulsé les communautés du Cantagallon dans le département du Sur de Bolivar, communautés qui réclament pacifiquement le droit à la santé. Les communautés dénoncent que l’ESMAD est entrée dans les maisons, a envoyé du gaz à l’intérieur et a violemment tiré sur les habitants. Suite à ces opérations de l’ESMAD, un villageois, OSCAR LUIS PEÑA REDONDA a été tué, plusieurs habitants ont été arrêtés et la détresse, l’anxiété et la terreur se sont propagées dans les communautés.
Durant les dix-huit jours de manifestations, la communauté a demandé l’ouverture d'un dialogue avec les autorités compétentes pour traiter de la grave crise concernant le droit à santé à laquelle fait face la municipalité. Cette situation a mis en danger la vie d'environ 7000 personnes qui ont besoin d’une attention particulière en ce qui concerne leur état de santé.
Nous dénonçons et nous alertons la communauté nationale et internationale en ce qui concerne les remarques contre les leaders, dirigeants et villageois qui sont impliqués dans la contestation, ainsi que leurs stigmatisations. Les fonctionnaires et anciens fonctionnaires ont affirmé que ce sont des guérilleros qui mènent la protestation dans la ville. De ce fait, le niveau de risque encouru par les dirigeants et les leaders dans cette région, que l'État refuse de protéger, augmente.
Hier, via une action urgente, nous avons mis en exergue l’absence de volonté politique du gouvernement colombien de s’attaquer aux graves problèmes auxquels font face les communautés dans cette région du pays et nous avons dénoncé la violente réaction de l'État qui réprime l'exercice du droit d'association et de manifestation pacifique. La commission pour le dialogue dans le Sur de Bolívar et le centre et sud du Cesar, a dénoncé l'incapacité persistante du gouvernement concernant la signature d’accords avec le Sommet agraire, paysan, ethnique et populaire. Le gouvernement national a promis de relancer et de donner une impulsion nouvelle aux tables de dialogue régional. Toutefois, le Bureau de la défense des intérêts du Sur de Bolivar et Sur de Cesar n’a pas été relancé. Les informations fournies par la police nationale de la ville de Bogotá nous apprennent que l’expulsion d’aujourd’hui a reçu une ordonnance du tribunal et par conséquent, le gouvernement s’est excusé pour son incapacité à intervenir.
ANTECEDENTS
Depuis le 18 février 2014, les communautés ont participé à une protestation pacifique pour le droit à la santé, sans que pour autant les autorités locales, régionales et nationales n’abordent et ne résolvent les exigences des communautés.
Le bilan de la communauté de Cantagallo en matière de santé est désastreux :
- Deux ans sans médecin dans les régions rurales ;
- Un seul médecin dans les villes pour 8000 personnes ;
- Des infrastructures sanitaires en mauvais état, inachevées et abandonnées ;
- Un manque de personnel de santé, incluant des médecins et infirmières, une situation exacerbée dans les zones rurales ;
- Des décès suite à l'absence de soins en temps opportun et/ou l'aggravation de l’état de santé de nombreuses personnes et ce, pour les mêmes raisons;
- Un déficit budgétaire ;
- Le non-respect des projections du plan de développement municipal en ce qui concerne la question de la santé (voir le tableau des programmes, sous-programmes et projets inclus dans le plan de développement);
- Le déséquilibre dans la mise en œuvre du plan de développement, l'augmentation des investissements dans certains secteurs ce qui entraîne une diminution de l’investissement dans certains secteurs vitaux comme la santé.
ASOCIACIÓN DE FAMILIAS AGROMINERAS DEL SUR DE BOLÍVAR Y ANTIOQUIA (AFASBA)
COMISIÓN DE INTERLOCUCIÓN DEL SUR DE BOLIVAR, CENTRO Y SUR DEL CESAR
COMISIÓN DE DERECHOS HUMANOS DEL CONGRESO DE LOS PUEBLOS
Bogotá, le 6 Mars 2015
L’armée a pris des installations où fonctionnent des organisations de la commission de dialogue du Sud de Bolivar et du Sud du Cesar, des processus organisationnels qui font partie du Congrès des Peuples.
Les organisations citées plus haut dénoncent devant la communauté nationale et internationale les faits suivants, qui constituent un risque élevé pour les associations agro-minières, sociales et communautaires dans le sud de Bolivar, des violations de la liberté d'expression et d'information et une violation flagrante du droit international humanitaire.
FAITS
1. Depuis le dimanche 1er mars 2015, un commando spécial de la 5éme Brigade de l'Armée a occupé le centre communautaire de la municipalité d'Arenal, Sud de Bolivar, où se situent plusieurs organisations qui font partie du Comité de défense du Sud de Bolívar et du Sud de Cesar, parmi lesquels la Fondation Rescate Cultural –FUREC- et la Coopérative COOMUARENAL et qui constitue le lieu de réunion de plusieurs organisations paysannes et afro-descendantes de cette commune.
2. Les Forces armées ont pris possession du lieu, ont construit un camp militaire et ont entravé le fonctionnement des organisations, une situation qui constitue une violation claire et ouverte du droit international humanitaire. De plus, elles ont mis en danger la population civile de la municipalité puisque le centre communautaire se situe dans le milieu de la ville.
3. Une délégation du Sistema de Alertas Tempranas du Défenseur du peuple et du Congrès des peuples était présente et a constaté cette situation, en même temps qu’ils demandaient des explications à l'armée à propos de leur grave comportement criminel. L'armée nationale a affirmé à la délégation qu’ils avaient été appelés par la police de la municipalité, compte tenu des possibles attaques aux installations de la police ; ainsi, le but de leur présence était de protéger le corps de police.
4. Dans le centre communautaire se trouve le siège de la Fondation Rescate Cultural –FUREC-, concessionnaire de la licence de fonctionnement de la station de radio communautaire Arenal Stereo, connue sous le nom Negrita Stereo. Il est à noter que FUREC a été constamment persécutée par le maire ALDOMAR PABUENA, l’employé municipal FABIO RODRIGUEZ SIERRA et la police de la municipalité d’Arenal. Cela peut être mis en évidence grâce aux actes systématiques de pression et aux menaces proférées par ces autorités qui ont entravé l'exercice des droits d'association, la liberté de pensée, d'expression et d'information, d’après des faits déjà dénoncés. Aujourd'hui, la représentante légale de FUREC doit comparaître devant l’inspection de la police de la municipalité, ce qui constitue sa troisième comparution devant cette entité. FUREC a dû défendre la station de radio communautaire suite à une série d’accusations, de diffamations et de dénonciations provenant du maire depuis différentes entités telles que le Ministère de la Communication, ce qui constitue un effort pour prendre le contrôle d'un média qui transmet et diffuse des informations sérieuses et impartiales dans la région.
5. De même, les collectivités du Sud de Bolivar avertissent de la présence durant les derniers jours de groupes paramilitaires apparemment armés entre les villes d’Arenal et de Norosí. Selon les informations de la communauté, le groupe armé a été vu patrouillant et rentrant dans la ville d’Arenal dans la nuit. Une situation similaire se produit dans la ville de Tiquisio et dans une partie de Norosí où les paramilitaires agissent publiquement et ouvertement et génèrent de la peur et de l'anxiété dans la population à travers des extorsions et la promotion de la plantation de cultures illicites.
6. D’autre part, les autorités locales, régionales et nationales ne démontrent pas la volonté politique de répondre aux graves problèmes auxquels sont confrontées les communautés dans cette région du pays. Le gouvernement n'a pas respecté l'accord avec le Sommet agraire, paysan, ethnique et populaire en ce qui concerne la réactivation du Bureau de dialogue du Sud de Bolivar et du Sud de Cesar. Pendant ce temps, les communautés ont dû faire usage de leur droit de manifester pacifiquement par le biais des diverses manifestations et des actions en cours dans la région, mais le gouvernement n'a pas répondu à l’appel des communautés.
7. Depuis le 23 Février 2015, les communautés paysannes de la municipalité de Cantagallo ont organisé une journée de protestation pour le droit à la santé pour faire face à la grave crise et à la détérioration de ce droit dans la ville. Cette crise a été exacerbée par la décision prise par la mairesse de la municipalité, Janeth Cortes, de ne pas envoyer les ressources nécessaires pour le fonctionnement du centre de santé, ce qui s’ajoute aux deux années sans personnel médical pour assurer une attention adéquate à la population dans la zone rurale, une situation qui a mis en danger la vie de centaines de résidents de la municipalité.
8. Le 5 Mars 2015, vers 18 heures, des étudiants de l’établissement d’enseignement Efigenio Mendoza, passant devant la station de police, ont été abordés par un policier qui leur a dit qu'il était interdit de passer par cet endroit, car il y avait des informations qui indiquaient la venue des guérilleros. Compte tenu de ce commentaire les mineurs ont répondu qu’il est possible de circuler librement dans la rue. Selon la version de ces mineurs, les policiers les ont insultés en utilisant le terme "salauds". Ensuite, les enfants ont couru et le policier sentinelle est sortie à son tour du poste de police pour les chasser jusqu’à en attraper l'un d’eux, qui est fils d’un leader, en lui prenant son sac.
8. Après douze jours de protestation permanente devant les installations de la marie municipale, la réaction des autorités locales a été de menacer les manifestants avec une expulsion violente sans apporter aucune solution face à leurs exigences.
9. Depuis les zones rurales de la municipalité de Cantagallo, plusieurs communautés affectées par l'éradication des cultures illicites, où une série de violations de leurs droits tels que, par exemple, des descentes dans leurs maisons, se sont mobilisées pour protester contre les actions des autorités.
10. Dans la municipalité de Norosí après une réunion infructueuse avec JUAN CARLOS GOSSAIN, gouverneur du département de Bolivar, dans laquelle les participants ont été insultés et abusés par cette autorité, devant leurs revendications, les communautés ont décidé de déclarer une grève illimitée jusqu'à la nomination de la totalité du personnel nécessaire pour assurer le droit à l'éducation des enfants et des jeunes dans cette municipalité.
Nous réitérons le manque de volonté du gouvernement de répondre aux revendications des communautés et la violation des engagements pris à la commission de dialogue du Sud de Bolivar. De plus, nous avons observé des réponses d'agression et de répression face aux diverses manifestations et une haute militarisation de nos territoires, comme la présence de plus de 180 troupes de l’ESMAD, qui ont atteint les villes de Gamarra et Aguachica dans le sud de Cesar, prétendument suite à des rumeurs de protestations des paysans et des mineurs de la région du Sud de Bolivar.
NOUS EXIGEONS:
• Que l'armée quitte immédiatement les locaux du centre communautaire de la municipalité d'Arenal afin que cesse un quelconque risque pour les civils et restaure le droit d'association et le fonctionnement des organisations paysannes, afro-descendantes et communautaires.
• Que les autorités compétentes, le procureur et le bureau du procureur général ouvrent des enquêtes disciplinaires et pénales pour que ces violations du droit international humanitaire et des droits humains imputables à des membres de la 5éme brigade de l'armée dans la municipalité d’Arenal soient punies rapidement et efficacement. De même, nous demandons que le comportement du maire et du représentant municipal soit sanctionné, c'est-à-dire leur permission et non dénonciation face à ces comportements qui mettent en danger les habitants qu’ils ont la responsabilité constitutionnelle et légale de protéger.
• Que cessent immédiatement et que soient soumis à des enquêtes les faits de persécution contre la Fondation Rescate Cultural -FUREC-, titulaire de la licence d'opération de la radio communautaire Arenal Stéréo, car ces faits entravant entre autres les droits d'association, la liberté de pensée et d'expression et pourraient engendrer une responsabilité internationale de l’État pour violation des dispositions de divers traités internationaux sur les droits humains signés et ratifiés par la Colombie.
• Que soient protégés les dirigeants du Comité de dialogue du Sud de Bolivar et du Sud de Cesar et les membres du Congrès des peuples contre d'éventuelles représailles qui pourraient arriver à cause des dénonciations faites contre les violations des droits humains et du droit international humanitaire qui continuent de se produire dans cette région.
COMISION DE DERECHOS HUMANOS DEL CONGRESO DE LOS PUEBLOS
COMISION DE INTERLOCUCION DEL SUR DE BOLIVAR, CENTRO Y SUR DEL CESAR