En Colombie, nous assistons à un retour de la barbarie contre le peuple colombien et qui se traduit par des massacres et des assassinats sélectifs, avec la connivence des forces de l’État contre des jeunes innocents et des leaders sociaux dans différents territoires du pays; l’éradication forcée des cultures et la réponse militaire aux manifestations paysannes des producteurs de feuilles de coca, l'intention de reprendre les pulvérisations aériennes de glyphosate, les faux positifs judiciaires, les menaces, la forte militarisation et paramilitarisation des territoires et un certain nombre de mesures prises par le gouvernement national qui, contrairement à la résolution des problèmes auxquels est confrontée la grande majorité de la population colombienne, approfondit beaucoup plus les causes structurelles qui ont engendré le conflit social, politique et armé.
L’État colombien a toujours eu pour politique de mener des pratiques de guerre sales, de commettre des actes de génocide et d’appliquer différents types de violence contre la population et en particulier contre les mouvements sociaux et populaires.
Face à ce sombre panorama, l’Asociación nacional campesina Coordinador Nacional Agrario (Coordination nationale agraire de l'Association nationale paysanne), en tant que défenseur de la vie, des territoires et de la permanence en eux, dénonce la politique d'extermination et d'anéantissement de toute expression de résistance et d'opposition au modèle existant de domination et d'accumulation. Ce que nous vivons aujourd'hui n'est pas quelque chose de différent de ce que nous avons déjà vécu dans un autre épisode sombre de notre histoire, avec la politique de sécurité démocratique mise en œuvre par le gouvernement Uribe qui a intensifié ses actions contre le peuple colombien.
Faits :
10 août 2020. Assassinat de deux mineurs :
À la frontière des départements du Cauca et de Nariño, des paramilitaires ont assassiné Cristian Caicedo, 12 ans, et Maicol Ibarra, 17 ans, alors qu'ils se rendaient au Colegio San Gerardo. La veille, des combats intenses ont eu lieu entre les dissidents des FARC et les Forces d'autodéfense gaitanista; Ce dernier groupe (paramilitaires) a vu les jeunes tôt en matinée, les a suivis pendant quelques minutes puis les a tués en les tirant à bout portant avec des armes à longue portée.
11 août 2020. Assassinat de Patrocinio Bonilla:
Dans la municipalité d'Alto Baudo, aux abord du ruisseau Emparaidá de la communauté de Santa Rita, un groupe de personnes coupait du bois, lorsqu'un groupe paramilitaire est arrivé et a emmené 15 habitants. Ce groupe a laissé partir les otages un par un, restant avec le camarade Patrocinio Bonilla. Quelques instants plus tard, des coups de feu ont été entendus, qui l’ont tué. Patrocinio était le fondateur de l'organisation ASOKINCHAS, un processus organisationnel qui fait partie de la CNA.
12 août 2020. Massacre de 5 enfants à Cali:
Cinq enfants ont été retrouvés assassinés ce soir-là dans le secteur de Llano Verde, à la hauteur du pont qui mène à l'ancienne décharge de Navarro, au sud de Cali. Les enfants étaient portés disparus depuis le midi, mais c’est seulement après dix heures du soir que leurs corps ont été retrouvés; quatre d'entre eux dans un ravin et un autre à proximité d'une école du secteur.
Il a été établi que l'un d'eux a été décapité et les autres présentent des impact de balles á bout portant. Les autorités étaient présentes sur les lieux des événements et ont procédé à l'inspection des corps. Les corps présentaient étrangement des morsures de chiens, des animaux fréquemment utilisés par les gardiens de cañaduzal. Cependant, ni les gardiens ni la société de sécurité privée n'ont donné leur version des événements malgré le fait qu'il y ait de nombreux doutes.
Les proches disent que lorsqu'ils sont entrés dans le cañaduzal, ils ont rencontré des policiers, qui n'avaient pas répondu à l'appel pour commencer la recherche des enfants jusqu'alors portés disparus. Certaines versions indiquent la présence de patrouilles de police s'éloignant mystérieusement de la zone des meurtres.
15 août 2020. Massacre à Samaniego (Nariño) de 8 jeunes:
Le 15 août, un groupe de jeunes quittait le village de La Catalina à quelques minutes de la zone urbaine de la commune de Samaniego, département de Nariño. Pendant la nuit, ils ont été surpris par des hommes cagoulés qui leur ont tiré dessus à plusieurs reprises, en tuant instantanément certains et en blessant gravement d'autres. Malgré les versions de la police où ils affirment être arrivés à leur recherche, les proches et ceux qui les connaissaient ont catégoriquement nié.
L'État a voulu justifier le massacre en soulignant que les jeunes avaient des relations avec des membres de groupes armés. Des paramilitaires du groupe Los Contadores sont arrivés dans la région ces derniers mois.
17 août 2020. Massacre de 3 Awá, Ricaurte Nariño:
Selon des membres de la communauté de la réserve autochtone de Pialapi Pueblo Viejo, 3 autochtones awá ont été tués. Une délégation composée du gouverneur autochtone et du coordinateur de la terre et de la justice s’est déplacée sur les lieux. Jusqu'à présent, en raison de l'accès difficile à la zone, les autorités autochtones n'ont pas identifié les personnes tuées et les causes qui ont donné lieu à ces événements malheureux.
18 août 2020. Assassinat de Edwin Cruz
Le 18 août, Edwin Cruz, 25 ans, fils du camarade Deobaldo Cruz, un dirigeant social appartenant à l'association paysanne de Puerto Asís AsocPuertoAs (affilié à la CNA), a été assassiné aux mains de dissidents des FARC, dans la municipalité de Puerto Asís, dans le couloir de Puerto Vega Teteye, département de Putumayo. Le camarade Deobaldo était présent le 19 mars dernier, lorsque des dissidents des FARC ont sorti le camarade Marco Rivadeneira d'une réunion, celui-ci a été assassiné quelques minutes plus tard, quelques mètres plus loin.
Les communautés de la région ont résisté à la répression militaire et policière pour l'éradication forcée des cultures de feuilles de coca dans la région, lors d’événements qui ont laissé des paysans blessés, capturés et morts.
18 août 2020. Assassinat de Fabio Andrés Gómez:
Ce jour-là, le camarade Fabio Andrés Gómez a été assassiné. Il était affectueusement connu sous le nom d'Atacuari, il était coordonnateur de la Garde paysanne de l'Association des conseils d'action communautaire, processus social et communautaire Asocomunal (association membre de la CNA). Fabio était président du comité d'action communautaire du village de La Cristalina, et il a mené différents processus dans sa communauté.
Son assassinat s'est produit lorsque des paramilitaires sont arrivés à sa ferme dans d'Angostura où il vivait avec sa famille dans le village de La Emboscada, zone rurale de la municipalité d'Argelia, département du Cauca. Ils lui ont tiré dessus à plusieurs reprises, ils l'ont tué.
Cette persécution de la population paysanne et ces assassinats, contre les membres et les dirigeants d'une organisation sociale qui se bat et résiste pour sa survie et la défense du territoire se produit dans des territoires à forte présence militaire et policière, qui, selon les versions des communautés, agissent main dans la main avec les organisations paramilitaires. Ces actions extrêmement graves engagent l'État colombien par action directe ou par omission.
Les communautés organisées dans le CNA exigent que la vie de toutes les personnes soit protégée, et d’autant plus pour celles qui mènent et participent aux processus sociaux et aux organisations. Nous exigeons également la pleine garantie des droits humains, la pleine participation et les possibilités concrètes de construction sociale. Nous continuerons la lutte pour un modèle qui privilégie la vie, la dignité et le respect de l'environnement, contrairement aux intérêts écocidaires du grand capital national et transnational.
NOUS EXIGEONS :
À l'État colombien qu’il arrête le génocide contre le peuple colombien, la politique de la faim, de la guerre sale et de l'extermination.
Le respect de la vie, des biens des communautés et de la permanence sur le territoire.
Nous appelons :
Les organisations sociales nationales et internationales, les ONG, les médias et les secteurs politiques à rejeter la politique terroriste de l’État colombien et à intensifier les actions de dénonciation et de pression contre ceux qui veulent nous enlever notre vie et notre territoire.
NOUS TENONS POUR RESPONSABLES :
L'État colombien et son représentant Iván Duque, le bureau du Procureur Général de la Nation, le Ministère de l'Intérieur, la Force publique qui, par omission ou par participation, ont permis la violation du droit fondamental à la vie.