16 mois après le retour sur leurs terres, les communautés déplacées d’Arauca maintiennent une résistance féroce face à la pétrolière multinationale qui voulut à nouveau les expulser. La nouvelle tentative de déplacement tardera jusqu’à ce que soient définis les lieux géographiques des terrains, entre les municipalités d’Arauca et d’Arauquita.
L’entreprise nord-américaine Occidental de Colombie (OXY) a présenté une plainte devant la mairie d’Arauca, dans le nord-est de la Colombie, pour déplacer un groupe de familles paysannes qui occupaient leurs terres depuis 16 mois, ces terres se situant dans la municipalité d’Arauca selon la OXY.
Le 26 février, un groupe de journalistes, dont le corresponsable de Colombia Informa, ont accompagné la topographe et l’avocat représentant cette municipalité au Secrétariat de Planification d’Arauquita, jusqu’au champ pétrolifère de Cano Limon où se trouvent les familles déplacées. À leur arrivée, des membres de l’Armée bloquaient le passage aux agents de services publics et à la presse pour des raisons de sécurité. Toutefois, le Secrétaire de la Planification a réussi à faire en sorte que les militaires laissent passer les avocats de la défense la communauté, ainsi que les médias couvrant l’évènement.
L’inspectrice de police d’Arauca a refusé l’accès au Secrétaire de Planification d’Arauquita et à la topographe, ayant contracté son propre topographe le 25 février. Selon plusieurs sources, le géomètre aurait utilisé un GPS de la Fondation El Alcaravan, une fondation de la OXY. L’inspectrice a insisté pour que les seules données prises en compte pour la décision, soient celles du topographe l’accompagnant. En effet, le concept de topographie détermine si les paysans se trouvent dans la municipalité d’Arauca ou d’Arauquita, et dans le premier cas, au déplacement forcé par l’inspectrice et les forces publiques.
Pour sa part, le groupe de paysan-ne-s ne se fait pas d’illusion sur la transparence du processus de vérification, d’où leur décision de bloquer le passage au topographe engagé par l’inspectrice. La police a réagi en envoyant l’Escadron anti-émeute (ESMAD) engageant ainsi une confrontation, l’ESMAD ayant attaqué les paysan-ne-s qui ont alors décidé de se défendre.
Cette situation s’est résolue avec la décision de réaliser la révision topographique de manière conjointe car selon divers individu-e-s présent-e-s, les membres de la OXY influenceraient les travaux de l’inspectrice de police. Des membres de la Corporinoquia et des représentants du Bien-être Familial étaient également présents.
Les révisions n’ont pas permis de déterminer si les communautés se trouvent en Arauca ou en Arauquita. L’avocate représentant la OXY a ainsi demandé d’une part la suspension de l’audience jusqu’à ce que l’Institut de Géographie Agustín Codazzi certifie les coordonnées, et d’autre part que les mairies d’Arauca et Arauquita déterminent la délimitation exacte du territoire. La OXY a sollicité en outre que l’Institut Agustín Codazzi analyse les coordonnées avec un GPS de précision. De façon à que soit irréfutable la détermination des points spécifiques, alors qu’un simple GPS de navigation présente plus d’imprécision.
Devant la possibilité de déterminer de manière technique les points exacts de délimitation entre l’Arauca et l’Arauquita, et, par ce fait même, la localisation des paysan-ne-s, l’audience a été suspendue dans l’attente des résultats. Pour le groupe de paysan-ne-s, cette suspension leur permettrait de gagner du temps et de préparer leur défense juridique pour s’opposer à la OXY et à leur déplacement forcé.
Ce groupe de communautés agraires fut déjà victime de déplacement forcé, hors de ces terres, il y a 20 ans et ne fut jamais relocalisé. En 2011, le Tribunal Supérieur de Cundinamarca rendit une décision en faveur des paysan-ne-s déplacé-e-s et dépossédé-e-s en ordonnant à l’Institut colombien de développement rural –INCODER- de leur rendre leurs droits et de réaliser la relocalisation des familles.