Du 10 au 30 janvier 2024, Mycotrophe et le PASC ont organisé la première tournée “Fungicultura popular” en collaboration avec le Congreso de los Pueblos et la Redher. Lors de cette tournée de mycologie populaire, une dizaine d’ateliers ont eu lieu pour aborder le partage de connaissances techniques sur la culture des champignons, la culture en laboratoire, la construction de microlaboratoires et les méthodes de productions adaptées au territoire. Les ateliers ont permis de considérer la mycologie comme une alternative pour l’économie locale, la souveraineté alimentaire ainsi que les processus d’autonomie en santé.
La tournée a commencé dans la zone du Café à Ibague, Perreira et Antioquia. À chaque atelier, entre 15 et 30 personnes étaient présentes, ayant parfois parcouru plus de 6 heures d’autobus pour s’y rendre, un carnet de notes en main. Des personnes de tous les âges, en contexte urbain ou paysan, se sont attelées à la tâche de construire des incubateurs à inoculation, qui permettent de manipuler le mycélium en toute circonstance avec une simple caisse de plastique. Pour les novices, le mycélium est la plante dont le fruit est le champignon.
L’équipe était accompagnée de la Guardia Cimarrona (garde marron), qui a copiloté notre fungi mobile pendant plus de 2 000 km en passant de climats tropicaux à des climats plus froids situés à 4 500 m d’altitude. La tournée s’est ensuite dirigée vers Boyaca pour y faire pousser des pleurotes locaux à Raquir et Moniquira, où il y avait une forêt pédagogique, un projet collectif d’une association paysanne qui souhaite relier le corridor du chêne.
C’est ensuite vers Santander que s’est dirigée la tournée où nous avons été reçu·es par l’association des femmes du Paramo de l’Almorzadero. Les Paramos sont des écosystèmes protégés où poussent, entre autres, des Frailejones, des arbres centenaires qui ne grandissent que d’un centimètre par an. Ces écosystèmes sont menacés par des intérêts miniers, notamment canadiens, et ces derniers jours par des incendies criminels : des centaines d’hectares de Frailejones ont brûlé en janvier. Les Paramos représentent 70 % des réserves d’eau douce de la Colombie.
L’Organisation féminine populaire dans sa ferme pédagogique de Lebrija, au Santander, qui produit déjà des huiles essentielles, des savons et autres produits médicinaux a construit sa propre hotte d’inoculations, pour commencer la culture de champignons.
La tournée s’est finie dans la ville de Bogotá, dans la localité d’Usaquen.
Malgré des lieux divers, et considérant toutes sortes de risques de contamination, où poils de chat, chien et cochon auraient pu mettre à mal la culture du mycélium, la tournée est déjà un succès. Les premières cultures faites pendant les ateliers ont déjà pu être transférées sur des substrats locaux après quelques jours de colonisations.
En somme, 250 personnes provenant de dizaines d’organisations locales ont pu participer à ces ateliers, et tout cela avec un budget total de 2 500 dollars canadiens. D'ailleurs, il nous reste encore quelque 1000 dollars à trouver si vous voulez soutenir l’initiative!
« Merci beaucoup pour ce merveilleux partage, Internationalisons la lutte, mondialisons l'espoir »
« Nous sommes déjà prêts à développer la culture de pleurotes et du shiitake dans des substrats spécifiques à la région cultivés dans des systèmes agro-écologiques . »
« J’ai trouvé très important ce que Nicolas a mentionné, à savoir que ces exercices scientifiques sont des espaces de démocratisation du savoir, en dehors des universités. Il est important de transmettre le savoir aux classes populaires qui n’ont pas accès à l’enseignement supérieur et que ce savoir ne soit pas limité à ces espaces, mais qu’il puisse et doive être reproduit parmi les gens ordinaires. »