Déposé le 14 Juin, le ton, le contenu et le silence entourant la publication du rapport rend perplexe sur ce que le gouvernement tente de cacher.
Le 14 Juin, le gouvernement canadien a discrètement déposé son deuxième rapport sur les impacts sur les droits de humains du à l’entente de Libre Échange Canada-Colombie. Si discrètement en fait, qu’il est presque passé inaperçu, même pour ceux qui l’attendaient. Le rapport a été déposé à un greffier à la fin de la journée plutôt que durant les procédures de routine de la « Casa de Narino ».
L’obligation de faire des rapports a été entérinée en 2010 pour répondre aux inquiétudes selon lesquelles l’Accord de Libre Échange allait exacerber la situation, déjà alarmante, des droits humains en Colombie. Le gouvernement avait vanté que ces rapports seraient une bonne façon d’assurer le respect des droits humains dans le commerce avec ce pays d’Amérique Latine en difficulté.
Malheureusement, le ton et la teneur du dernier rapport ainsi que la façon subtile dont il a été déposé, semble voir été voulu pour éluder les regards, ce qui nous fait nous demander ce que le gouvernement cherche à cacher.
La petite portée du rapport se limite à l’analyse des mesures prisent pour la mise en œuvre de la loi, loi qui régit la mise en œuvre locale de l’accord commercial par le Canada. En interprétant l’obligation de la sorte, le gouvernement évite tout examen de l’impact des investissements Canadien en Colombie (incluant le pétrole, le gaz et les mines). Ceci remet en question l’essence même de l’exercice. Les intérêts canadien pour l’extraction minière en Colombie étaient une des raisons de bases pour la ratification de l’accord commercial. C’était cette même raison qui a fait réagir les groupes de défenses des droits humains qui s’inquiétaient des impacts de cet accord.
Secteur minier sous observation
Cette inquiétude était justifiable et l’est encore : les compagnies canadienne représentent plus de la moitié du secteur minier de la Colombie. Un rapport de Mai 2013, publié par le contrôleur général du gouvernement colombien, démontre que 80 pour cent des violations des droits de humains, 87 pour cent des déportations, 78 pour cent des crimes contre les syndicalistes et plus de 89 pour cent des crimes contre les autochtones et les Afro-Colombiens se sont produit dans les régions de production minière et pétrolière.
Ces pourcentages sont d’autant plus alarmants quand on considère l’ampleur de ces problèmes : la Colombie est le pays avec le plus grand nombre de déportés à l’intérieur de ses frontières dans le monde, avec 256 590 nouveaux cas en 2012. Selon la plus haute cour du pays, plus du tiers de la population autochtone de la Colombie est menacée d’extermination (une crise alimentée par la violente imposition de mégas projets sur les territoires autochtones). De plus, en 2012, plus de 280 syndicalistes colombien ont été menacés de mort et 20 d’entre eux ont été assassinés, faisant de ce lieu le plus dangereux au monde pour les syndicalistes.
Malgré les affirmations du gouvernement sur le fait que l’Accord de Libre Échange améliorerait les droits humains, les violations des droits des travailleurs (surtout ceux du secteur pétrolier et gazier) sont encore très répandues.
Le mois dernier, deux chefs syndicales ont visités le Canada pour dénoncer les violations faites par la compagnie pétrolière canadienne Pacific Rubiales Energy. La compagnie utilise des méthodes d’embauche et des conditions salariales qui ne respecte pas les minimums requis par les législations colombiennes du travail ainsi que par l’Organisation Internationale du Travail. Il y a aussi eu des attaques contre des ouvriers syndiqués qui tentaient de négocier avec la compagnie.
Dans ce contexte, s’engager dans le développement des ressources contient un grand risque de contribuer ou de profiter de ces violations des droits humains et du travail. De tels risques requièrent le plus haut niveau de diligence, non seulement des corporations impliquées, mais aussi de la part des gouvernements qui favorisent ces investissements.
De plus, une bonne diligence aurait voulu que l’élaboration du rapport sur les droits humains se fasse en consultation sérieuse et crédible avec les parties en causes, incluant des organisations sur les droits humains et les communautés impliquées. A lieu de cela, le gouvernement à lancer un appel d’offres sur son site web sans aucune recherche, malgré avoir récemment été approché par plusieurs groupes soucieux d’avoir des occasions de fournir des informations. Les participants se sont fait donner sept jours ouvrables pour répondre à cet appel qui n’a fait l’objet d’aucune publicité. Pas étonnant qu’aucunes informations n’ai été reçu.
Le premier rapport annuel sur les droits de l’Homme concernant l’échange économique, qui a été publié l’an dernier, était aussi un faux rapport. Le gouvernement l’a au moins admis, mais il arguait que ce n’était que parce que l’accord n’était pas en vigueur depuis assez longtemps pour pouvoir faire une bonne analyse des impacts de l’Accord de Libre Échange.
Au moins, le rapport de l’an dernier mettait en lumière des étapes méthodologiques pour les années à venir. Ces étapes consistaient à regrouper les divers secteurs affectés par l’ALÉ (incluant le secteur extractif) et de les jumeler avec des analyses des droits humains qui leur sont liées. Malgré l’élaboration de cette planification, aucune analyse de ce type n’a été faite pour le rapport de cette année. Au lieu de cela, le rapport se termine sur une note simpliste disant : « il n’est pas possible d’établir une conclusion à savoir s’il y a eu le moindre changement par rapport aux droits humains dans aucun des deux pays. »
Au mieux, cette conclusion sous-entend que l’Accord de Libre Échange ainsi que les normes du travail et les accords environnementaux secondaires (et de façon plus large, la Stratégie pour les Amériques du Canada) n’aident pas à l’amélioration de la situation des droits humains en Colombie tel que promis. Dans le pire, cela suggère que notre gouvernement ferme les yeux sur de graves abus des droits de l’Homme quand ils bénéficient aux intérêts commerciaux du Canada.
Rachel Warden et Barbara Wood sont des co-présidentes du Conseil canadien pour la coopération du Groupe d'orientation politique pour les Amériques, une société civile canadienne centrée sur les problématiques de développement et de justice sociale dans les Amériques.
Diane Ablonczy, ministre des Affaires étrangères juniors en charge des Amériques, aux côtés de Tim Martin, ambassadeur canadien en Colombie, au Sommet des dirigeants de l’Alliance du Pacifique en Colombie en mai.