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11/12/2012

La Piedra No 9, automne 2012

En 2011, le PASC lançait sa campagne pour cibler les profiteurs canadiens de la guerre en Colombie. La guerre sale qui ravage la Colombie n’est pas étrangère au Canada. En effet, de nombreuses compagnies canadiennes, principalement du secteur extractif, appuyées par l’État canadien, prétendent mener des projets de développement aux bénéfices des Colombien.ne.s, et entraînent en réalité destruction environnementale, militarisation des régions, répression politique, violations des droits humains, des normes du travail, des droits syndicaux, sociaux et territoriaux, etc.

Nous dénonçons le fait que la guerre en Colombie relève d’une guerre impérialiste, mais également la façon ces mêmes compagnies et l’État canadien persistent dans leur entreprise colonialiste sur le territoire de ce qu’on appelle le Canada. Deux exemples :

 

Enbridge

En Colombie, Enbridge se lance dans la construction d’un nouveau pipeline qui sera prêt en 2017 : 800 km à travers les Andes vers la côte ouest (Tumaco ou Buenaventura), pour vendre plus facilement le pétrole colombien sur le marché asiatique.

Déjà, Enbridge était impliquée dans le conflit colombien par la possession de 24,7% des parts de l’oléoduc d’Ocensa, qui sert à acheminer le pétrole de la Talisman. C’est le plus gros pipeline de Colombie. Il compte 17 bases militaires le long de son parcours et 1400 soldats sont assignés à sa protection. Ocensa a de nombreuses fois été lié à des violations de droits humains et de la répression1.

Au Canada, Enbridge opère le plus long pipeline du monde (du Canada aux États-Unis) et la plus grosse compagnie de distribution de gaz au pays, Enbridge Consumers Gas. La compagnie pilote le méga-projet de construction de l’oléoduc Northern Gateway de 1177 kilomètres en Colombie-Britannique, afin de transporter le pétrole des sables bitumineux albertains jusqu’à un port en eau profonde sur le Pacifique. Le Northern Gateway est un projet fortement contesté par les communautés autochtones de la région, le pipeline prétendant traverser leurs terres2.

Mais ne vous faites pas une mauvaise image d’Enbridge! C’est une compagnie responsable, qui distribue beaucoup de miettes dans les communautés où elle passe, surtout chez les communautés autochtones (éducation, santé, culture, environnement). Par exemple, Enbridge est le partenaire financier principal de « Our Story / Notre histoire – Concours canadien de rédaction et d’arts pour autochtones » (de même que la minière Vale, basée à Toronto), supporté aussi par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada3.

Une petite note supplémentaire : en mars 2011, des activistes du Michigan font campagne contre Enbridge (en utilisant les Yes Lab des Yes men) pour dénoncer la compagnie et son absence de responsabilité après la marée noire dans la rivière kalamazoo en juillet 2010. La rivière n’a toujours pas finie d’être nettoyée4.

 

rePlan

Si ce nom ne vous dit rien, c’est normal. rePlan n’est surtout pas une grosse compagnie d’extraction multipliant les méga-projets de par le monde. Ses ambitions sont beaucoup plus modestes: cette entreprise préfère offrir ses conseils et son expertise dans la « gestion des relocalisations de populations ». rePlan5 est active sur plusieurs projets impliquant des déplacements de population partout dans le monde, et surtout pour des compagnies extractives... Au Canada, la firme s’est trouvée un gros contrat avec les sables bitumineux d’Athabasca (et oui, ce qu’Enbridge veut transporter avec son pipeline...) pour planifier les infrastructures et s’occuper des « liens » avec la population locale, notamment les communautés autochtones – c’est à dire: leur faire comprendre tous les avantages d’avoir des sables bitumineux à côté de chez eux!

La compagnie canadienne Gran Colombia Gold a d’ailleurs fait appel à rePlan pour ses projets en Colombie afin qu’elle les conseille dans leur projet de mine à ciel ouvert dans la ville de Marmato, impliquant le déplacement de la population du centre urbain6. Les experts de rePlan ont ainsi rédigé un guide « user-friendly » pour outiller la minière dans ses « activités d’acquisition de territoires à travers le monde »... La firme est particulièrement populaire en Colombie pour les compagnies qui font face à de petits problèmes liés à leur implantation (entendez une farouche opposition): la sud-africaine Anglo Gold Ashanti, qui possède 690.000 hectares dans les projets Gramalote en Antioquia et La Colosa dans le Tolima, a retenu les services de rePlan pour planifier « l’acquisition de terrains, la compensation et la réinstallation » des populations, en « tenant compte des impacts sur la minerie artisanale, la paysannerie et les habitants ruraux », parce que c’est bien vrai qu’un méga-projet minier peut entraîner quelques implications à gérer... Mais ne vous en faites pas ! rePlan s’assure que tous ces projets rencontrent les normes de performance de l’International Finance Corporation (un groupe de la Banque mondiale...)

 

Plan Nord / Plan Sud : Entre fabrication de consentement et coercition

Ainsi, le modèle extractif continue de faire des ravages. En déployant multiples stratégies, l’État et les compagnies tentent de le faire accepter, ou du moins de réduire au silence l’opposition: responsabilité sociale, concertation, poursuites judiciaires, changements législatifs, répression violente...

Malgré tout cet appareil et ces moyens, l’opposition à ce modèle reste et demeure légitime. Nous devons donc œuvrer à construire cette légitimité et ouvrir/élargir des espaces de résistances. C’est pourquoi le PASC a monté un atelier (en plusieurs formats, de la conférence au débat de groupe) pour se donner des outils pour mieux comprendre COMMENT s’impose le modèle de développement capitaliste. En résumé, c’est la carotte et le bâton: la carotte, ce sont les stratégies «de consentement » plus douces, qui visent à prétendre à une unité sociale en cooptant, en niant ou en noyant l’opposition; le bâton, ce sont les stratégies « de coercition», plus violentes, qui bâillonnent les contestataires à l’aide des appareils législatifs, judiciaires et armés.

Si cela vous intéresse, communiquez avec nous!

 

1 Voir notamment Asad Ismi, « Canadian company Enbridge Spreads Disaster in Colombia » au http://www.pasc.ca/en/article/canadian-company-enbridge-spreads-disaste…

2 www.defendersoftheland.org et voir le vidéo de Submedia « Des membres de la nation Unis’toten bloquent le passage du pipeline » (sous-titres en français) sur http://submedia.tv/stimulator/2011/09/16/oil-gateway/

3 Stefan Christoff, « Is Enbridge using art to greenwash the Northern Gateway? » http://artthreat.net/2012/01/enbridge-art-funding/

4 Aller voir le vidéo “MyHairCares” an Enbridge Project sur http://youtu.be/mJ_FmIiGm_0Enbridge. Communiqué: « The Yes Men Clear Things Up: Enbridge Enraged by Hair Hoax; Michigan and Canada Perps Step Forward », 15 mars 2011, [En ligne] http://post.thing.net/node/3342

5 Un petit tour sur leur site web risque de vous donner le vertige : http://www.replan.ca/

6 Voir le site du PASC pour en savoir plus, notamment http://www.pasc.ca/fr/article/la-canadienne-medoro-ressources-rase-un-v… et http://www.pasc.ca/fr/article/victoire-partielle-pour-la-population-de-…

 

Author
PASC