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20/01/2018

une lutte pour la survie de la paysannerie.

Vendredi 12 janvier 2018 les communautés du Guayabo et de Bellaunion, municipalité de Puerto Wilches, département de Santander en Colombie ont repris leurs terres. Vers 11h du matin une centaine de personnes injustement évincées le 13 décembre dernier ont repris les terres de la ferme de San Felipe.

Cette reprise de terre est l'une des nombreuses actions directes qu'entreprennent des communautés paysannes en Colombie pour défendre leurs territoires. Cette communauté est en train de subir le troisième déplacement forcé après avoir acquis le droit de travailler et vivre sur ce territoire. Malheureusement le fait d´exiger le respect des droits humains et de dénoncer publiquement se retourne contre le paysan.

Cela fait 40 ans qu'une centaine de familles vit sur les bords du fleuve Magdalena, le plus grand du pays. “Si le fleuve pouvait parler, il nous dirait combien de mort la guerre l'a fait engloutir” nous explique un des leaders régional dont l'identité ne sera pas révélée pour protéger sa sécurité.

“Ils font maintenant avec la loi ce qu'ils n'ont pas pu faire avec les armes” ajoute son voisin.

Le juge de Puerto Wilches ne pouvait pas ordonner l'éviction le 13 décembre dernier puisque les familles reconnues comme victimes du conflit ont droit à l'évaluation de leurs cas par l'Agence nationale des Terres. De même, le bureau du procureur national a révélé des irrégularités dans le processus et l'inspecteur de Police en charge des premières tentatives d'évictions en 2013 est actuellement en prison pour paramilitarisme.

Alvaro Garcia a passé un an en prison il y a peu et 4 autres leaders sont dans une situation juridique délicate pour défendre publiquement leurs terres. Ces hommes et ces femmes ont utilisé tous les moyens légaux à leur disposition pour défendre les terres où ils sont nés et où ils ont vu grandir leurs enfants. Aujourd'hui c'est l'action directe qui leur permettra peut-être d'obtenir justice.

Des membres de la communauté sont intervenus auprès des personnes qui travaillaient au service de l'usurpateur depuis plusieurs mois. Celles-ci initialement soupçonné de soutenir le propriétaire terrien ont manifestés ne pas avoir été payé et ont sollicité le soutien de la communauté afin d’obtenir les ressources nécessaire à leurs retours chez eux. Le bureau des nations unies et les autorités nationales ont été invités à se rendre sur les lieux afin de constater la situation.

Les médias de communication ont relayés les propos de Rodrigo Henao selon lequel des guerilleros de l’ELN avait kidnappé ses travailleurs. La police, les militaires et service spéciaux anti kidnapping du Gaula sont intervenus le lendemain pour vérifier qu’il ne s’agissait pas d’une séquestration des travailleurs de la ferme ainsi que la non présence de guérillero ELN. Une méthode souvent employée consiste à accuser les paysans de guérilleros afin de justifier la dépossession et l’occupation de leur territoire à des fins lucratifs. Selon les dires d’un paysan, « ils sont en train de distribuer nos terres aux paramilitaires.»

Le chef de la police locale a finalement persuadé les travailleurs de se rendre avec lui au village afin de recevoir leurs argents, le propriétaire terrien maintient sa version de kidnapping bien que les forces de polices aient pu constater que c’était faut.

Ce conflit n'est pas local puisque ces terres en bord du Magdalena sont parmi les plus convoitées de la région. Des entreprises comme la Suisse Impala dans le domaine du transport, Anglo Gold Ashanti la minière sud africaine tourmentent les mineurs artisanaux du Sud de Bolivar à quelques kilomètres de là. Sans compter des intérêts pétroliers de fracturation, d'élevage intensif et agro industriels comme la palme africaine, font partie des menaces qui pèsent sur ces territoires.

Malgré cette réappropriation de terre, la lutte n’est pas terminée car le village situé à côté est aussi menacé d’expulsion, de dépossession et est victime d’abus et de menaces de la part des forces publiques.

Ces communautés réclament donc la reconnaissance de la culture paysanne, de son économie et de ses pratiques sociales et n’hésitent pas à unir leur force afin de défendre leurs droits.

 

Equipe d'accompagnement du PASC et de la REDHER



 

Auteur.trice
PASC