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01/03/2016

Aucune leçon n’a été tirée du passé pour le président colombien Manuel Santos qui a rencontré son homologue américain Obama le 4 février dernier pour discuter d’un nouveau Plan Colombie, qu’ils ont appelé "Paz Colombia". Le président Obama a déclaré : "Nous sommes fiers d’appuyer la Colombie et le renforcement de vos forces de sécurité, comme des réformes de vos lois qui ont consolidé vos institutions démocratiques". Alors que les deux gouvernements mettent sur la table cette proposition de « consolidation de paix » dans le cadre des accords qui ont lieu à la Havane, les fait nous rappellent les désastres causés par les précédents Plan Colombie.

Un rappel historique s’impose

Le premier Plan Colombie survient dans un contexte post guerre froide où les États-Unis continuent de vouloir maintenir leur hégémonie sur l’Amérique latine. Ayant sût prendre le contrôle du continent avec des tactiques anti-communistes, une transition vers la guerre contre le narcotrafic s’impose pour s’assurer du maintien de forces militaires dansles pays latino-américains. Les États-Unis alloueront d’abord 2.2 milliards de dollars à la Colombie, au Pérou et à la Bolivie transmis sous forme d’investissements économiques et militaires. Ainsi, la puissance américaine s’assurait un contrôle de l’insurrection, de la subversion.

En 1999, le Plan Colombie est lancé et s’étendra initialement sur six ans. 4.6 milliards de dollars sont alloués à la Colombie. Le trois quarts de cette somme est destiné à l’achat d’équipement militaire américain pour la Colombie et à l’entraînement de soldats et de policiers colombiens par des militaires état-uniens ou par des mercenaires des sociétés militaires privées (SMP) américaines, principales bénéficiaires du Plan Colombie. Cette sur-militarisation de la Colombie bénéficie grandement aux entreprises minières et pétrolières étrangères (notamment canadiennes) qui profitent de l’instabilité du pays pours’approprier des territoires et piller les ressources.

Suite aux évènements du 11 septembre 2001 aux États-Unis, la guerre contre le narcotrafic se substitue à une guerre contre le terrorisme. Les opérations militaires et l’argent alloué au Plan Colombie seront dorénavant utilisés pour une guerre contre-insurrectionnelle. En plus de servir à militariser le pays, les ressources du Plan Colombie seront utilisées en faveur de l’imposition de mégaprojets. L’expansion de projets extractifs ira de main avec la militarisation des régions riches en ressources naturelles. Parmi les mégaprojets que l’on voit naître, l’industrie agroalimentaire se transforme en terrain de jeux des monocultures, pour remplacer les champs de coca qui subissent les fumigations des stratégies contre le narcotrafic. Cependant, simultanément à l’implantation de cette stratégie, le trafique de drogue n’a pas diminué et s’est même vue augmenté et contrôlé par les groupes paramilitaires colombiens, AUC.

En 2006, une phase de consolidation du Plan Colombie a été adoptée, jusqu’à 2011 ayant comme principal objectif : Combattre le terrorisme, le narcotrafic et le crime organisé international. Puis de 2007 à 2013 un plan de stratégie pour le renforcement de la démocratie et le développement social est mis sur pied. Le budget alloué à la sphère militaire demeure le principal investissement, sécuriser les lieux pour laisser place à l'imposition de méga-projet extractif.

Plan Colombie et guerre sale

Dans une stratégie contre-insurrectionnelle, l'explosion des capacités militaires colombiennes renforcées par le Plan Colombie n’a pas laissé la population à l’abri des abus, bien au contraire. La vision selon laquelle les membres de guérilla sont cachés parmi la population civile a causé maintes violations du droit international humanitaire. Des assassinats, des disparitions forcées, des cas de tortures, de menaces, de judiciarisation se comptent par milliers et ce, plus particulièrement dans les régions riches en ressources naturelles. La violence imposée par les forces armées, groupes armés, groupes paramilitaires et agents privés force plus d’un million de personnes à être déplacées dans le pays. Parmi les victimes, on peut compter ceux et celles qui dénoncent ouvertement les industries extractives et les stratégies du gouvernement.

Le Plan mis en œuvre pour lutter contre le narcotrafic, puis le terrorisme, s’est plutôt inséré dans un modèle économique néolibéral dans l’intérêt des États-Unis et des multinationales. Cette pratique de colonisation économique va de pair avec des violations de droits humains, des violations du droit à un environnement sain et de violations de la souveraineté et autodétermination des peuples.

Cette fois le plan Colombie sur lequel se sont entendu les gouvernements de Santos et d’Obama se veut dans un objectif de consolidation de la paix, mais quand est-il des réelles implications d’une telle entente militaire et économique. Présentement, les groupes paramilitaires reprennent de l’ampleur dans les régions colombiennes et les persécutions contre la population persistent. Les mouvements sociaux tiennent à rappeler que la paix ne peut se négocier sans eux et que des changements structurels s'imposent.

Auteur.trice
PASC