Le PASC a lancé en 2004 sa campagne contre les agrocarburants en solidarité avec les communautés accompagnées dans le Bajo Atrato, Choco.
Agrocarburants.* Le mot est à la mode, ou plutôt sa contrepartie idéologique le « biodiésel » qui évoque des valeurs écologiques liés à un développement durable. Rien n'est pourtant plus loin de la réalité. D'un point de vue écologique, les agrocarburants produisent d'avantage de gaz à effets de serre que les combustibles fossiles en plus d'être développés par une agroindustrie qui privilégie les monocultures intensives, grandes consommatrices de produits chimiques et cause d'appauvrissement des sols, voire souvent de déforestation et de désertification.
Pour ces raisons entre autres, ce type de monoculture met directement en péril la souveraineté alimentaire, la biodiversité, les réserves d'eau potable, bref il accélère la crise écologique et la destruction de la petite paysannerie. Si cette nouvelle ruée vers l'Or vert permet aux magnats de l'énergie de parer leur recherche de profits de quelques sceaux « écologique » et « durable », leur objectif en reste néanmoins inchangé : fournir aux sociétés de (sur)consommation l'énergie nécessaire pour poursuivre le rythme effrénée de production actuelle. Il y a « crise des énergies combustibles » ? Le pétrole s'épuise? (et ses réserves sont contrôlées par des États non alignés sur les puissances occidentales) Qu'à cela ne tienne! La réponse à la crise énergétique consiste à répéter le scénario du pétrole : exploitation intensive, destruction environnementale, colonisation des territoires paysans (voire.. guerres impérialistes pour le contrôle des territoires stratégiques).
D'après l'Ong GRAIN, « pour les hommes d’affaires comme pour les hommes politiques, les agrocarburants représentent certainement l’une des plus acceptables des énergies “renouvelables” car ils peuvent facilement s'intégrer dans l’économie basée sur le pétrole qui existe actuellement. »
Selon les estimations, les plus grands producteurs agricoles devraient consacrer entre 30% (dans le cas des États-Unis) et 70% (dans le cas de l'Union Européenne) de leur production agricole annuelle à l'industrie des agrocarburants pour que leur consommation énergétique intègre à peine 10% du dit biodiésel. Puisque les puissances occidentales ne risquent pas de mettre leur souveraineté alimentaire en péril pour « verdir » (sic) leur consommation énergétique : la production d'agrocarburants incombe nécessairement aux territoires du Sud. Sous le couvert d'un nouveau discours de « révolution verte », les économies du Sud sont invitées à maintenir leur rôle d'exportateur de matières premières, défini en fonction des besoins d'expansion capitaliste du Nord.
Les agrocarburants figurent à ce titre parmi les « produits stratégiques » mis de l'avant par le gouvernement colombien pour ses exportations et pour ses dits « programmes de développement alternatif et social », sois-disant destinés à remplacer la culture de la coca et à favoriser la réinsertion des acteurs armés démobilisés.
Si, comme le disait le tristement célèbre Conseiller américain à la sécurité nationale, Henry Kissinger: « Qui contrôle le pétrole contrôle des nations entières; qui contrôle la nourriture contrôle les gens », alors l'industrie des agrocarburants se présente comme la panacée en terme de contrôle des populations et des territoires.
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* Les agrocarburants sont obtenus à partir de plantes oléagineuses (comme la palme africaine, le canola ou le soya) ou de l'éthanol, provenant de la fermentation de la cellulose contenue dans les végétaux (tels le maïs, la canne à sucre ou le blé).